Ce vendredi 6 juin marque un tournant dans le dossier Justice pour le Vivant (JPLV),
porté par les associations Notre Affaire à Tous, POLLINIS, Biodiversité sous nos
pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS depuis 2022 : la rapporteure publique a demandé aux
juges de condamner l’Etat pour sa responsabilité dans l’effondrement de la
biodiversité, et point historique, recommande d’ordonner à l’Etat d’actualiser les
protocoles d’évaluation des pesticides jugés défaillants.
Deux ans après la première condamnation de l’Etat, le 29 juin 2023, pour sa responsabilité
dans la contamination massive des écosystèmes par les pesticides, la cour administrative
d’appel de Paris pourrait reconnaître à nouveau l’existence du préjudice écologique
que l’Etat doit réparer.
La rapporteure publique recommande “qu’il soit enjoint à l’Etat de mettre en œuvre une
évaluation des risques sur les espèces non-cibles dans le cadre de la procédure
d’autorisation de mise sur le marché (AMM)” des pesticides.
Elle demande même qu’il soit procédé à l’examen des AMM problématiques actuellement en vigueur.
Concrètement la rapporteure reconnaît des failles dans la procédure d’évaluation et
d’autorisation de mise sur le marché conduite par l’ANSES (Agence nationale de sécurité
sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sous la responsabilité de l’Etat.
Reconnaissant un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques
et le déclin de la biodiversité, elle considère qu’il est établi qu’une actualisation des
procédures à l’aune des connaissances scientifiques les plus récentes permettrait de réduire
les impacts sur l’environnement des pesticides.
La rapporteure refuse cependant de reconnaître le caractère contraignant des objectifs de
réduction des pesticides des plans Ecophyto admettant ainsi ce que dénoncent les
associations depuis longtemps : ils relèvent davantage de la communication politique que
d’une stratégie environnementale sérieuse.
Plus inquiétant néanmoins, à rebours de la décision du tribunal administratif en 2023, la
rapporteure refuse de reconnaître une faute dans l’obligation de l’Etat de protection des
eaux. Les avocats des associations ont ainsi rappelé dans leurs plaidoiries que la
Commission européenne établit elle-même que la France ne pourra pas tenir ses objectifs
de protection des eaux souterraines d’ici 2027 conformément à la Directive cadre sur l’eau.
A noter que contrairement à l’audience de première instance tenue il y a deux ans, le
gouvernement, représenté par le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation s’est déplacé,
sans toutefois daigner plaider son cas. Laissant une nouvelle fois Phytéis le défendre, au
cours d’une plaidoirie fondée sur une stratégie du doute.
Dans un contexte d’attaques constantes contre l’environnement, comme en témoigne
notamment la proposition de loi Duplomb actuellement débattue au Parlement – qui vise
entre autres à réintroduire les néonicotinoïdes et à affaiblir l’indépendance de l’ANSES – ces
conclusions pourraient amener à une nouvelle décision historique et mettre un coup d’arrêt à
la politique mortifère du gouvernement en la matière.
« Nous nous dirigeons vers une victoire historique pour la biodiversité et l’ensemble du vivant
! Une décision qui pourrait tout changer : dans les pratiques agricoles, les politiques
publiques, et la façon dont l’Etat considère enfin la santé et l’environnement. Elle est le fruit
d’un combat de longue haleine, porté par des scientifiques, des associations, des citoyens et
citoyennes mobilisé·es partout en France — une véritable victoire collective qui s’inscrit
dans un large mouvement militant. », se félicitent les associations.
La décision de la cour administrative d’appel sera rendue publique avant mi-juillet.
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